Conflit d’intérêts dirons certains ?
Évitons la caricature…
Pour faire suite à mon précédent billet « Designer, la rébellion s’organise ! » faisons un point sur ce difficile exercice de funambule qui consiste à proposer les services d’une société à des utilisateurs, en étant payé par cette même société.
#ethique #ux #design.
Stratégie océan rouge…
Une marque se bat au quotidien pour exister, le contexte est parfois très concurrentiel.
Il est donc légitime pour elle de demander à son prestataire (M.Le Designer) de tout mettre en œuvre pour que son service/produit soit mis en avant en utilisant toutes les « armes » disponibles, ses concurrents les utilisent, c’est parfaitement légal, pourquoi hésiter ?
Aïe
De l’autre côté, l’utilisateur, dont nous sommes parfois, est souvent heureux d’utiliser un service lui apportant quelque chose de nouveau, de plus simple, etc, contre quelques infos dont il n’aura rien fait de toute façon (l’accès à ses mails ? son historique? de façon anonymisée bien entendu).
Petit à petit se tisse autour de l’utilisateur une toile composée de différentes apps, sites. Cette toile connait tout de nos petites habitudes et à se prénomme Big Data. Rien de machiavélique, pas forcément intentionnel mais l’info se constitue.
Jusque là, l’utilisateur s’en rendait compte mais l’acceptait au nom des services rendus en échange. Aujourd’hui le vent commence à tourner, on se sent épié, le sentiment général est à la surchauffe, pourquoi ?
– La personnalisation du web progresse tous les jours ; une bonne chose ? la pertinence, voilà qui est intéressant…mais ont peut y voir aussi la disparition des informations alternatives (et la diversité, c’est la vie !).
– Les notifications intempestives, conçues pour nous happer dès que possible. Au-delà du simple côté agaçant, c’est une source importante d’inefficacité au travail pour de nombreuses personnes.
– L’organisation des flux des réseaux sociaux grands publics, ou de services professionnels comme Linkedin conçu pour nous garder captif de leur ecosytème, basé sur une véritable économie de l’attention.
– …
Prise de conscience
La planète design frémit et commence à réagir.
On a pu voir certaines prises de position qui font déjà date. Je pense à Mike Monteiro, Design Director de Mule : « La création sans responsabilité entraîne la destruction » en 2015 :
https://youtu.be/qIcM21l61TE?list=PLyzb9DL11tda–6wVIX70DVq_qZNUQ9sU
On peut penser bien sur à Tristan Harris et son intervention TED avec sa belle métaphore du Bandit-Manchot !
Très récemment, le Festival ethicsbydesign.fr a synthétisé l’état de l’art. Ci-dessous, les slides de la présentation d’Hubert Guillaud d’InternetActu :
Ethic by…
De tous ces constats émergent la question de la responsabilité, ainsi que la dimension éthique sous toutes ses formes : par rapport à la société, à l’écologie entre autre. (En ressort d’ailleurs une nouvelle expression qui se décline à ces différents aspects : Privacy by design, Ethic by Design, Ecology by design…)
Mécanique
Je pense qu’il est important de distinguer 2 types d’acteurs : les marques et les plateformes (type GAFAM).
L’économie de l’attention a principalement été structurée par ces dernières, elles donnent indiscutablement le tempo.
Tristan Harris (de TimeWellSpent) propose d’attirer l’attention de 2 d’entre elles : « Je veux vraiment qu’on capte l’attention de deux entreprises : Apple et Google. Non pas parce qu’elles sont bonnes ou mauvaises, mais parce que ce sont celles qui ne vivent pas du temps que tu passes sur Facebook ou sur n’importe quelle application, ce n’est pas leur métier.
Ce sont les « gatekeepers », les principaux acteurs du marché. Pour filer avec la métaphore du bio, qui décide s’il y a des étals bio ou pas ? Ce sont les gens qui fabriquent les passerelles, ce sont les supermarchés pour le bio, et en technologie, ce sont les téléphones. » (source).
New Deal ?
Revenons à la marque qui sent bien que le vent tourne. Ou si ce n’est pas le cas, c’est le moment de faire preuve de pédagogie afin de l’accompagner vers des solutions moins intrusives. Il y a un cercle vertueux à mettre en place. Si une marque affiche (revendique !) sa bienveillance pour ses clients, cela aura bien évidemment un impact positif sur son image. Cela peut même être un belle thématique de communication pour elle. Attention tout de même à l’«Ethic Washing», souvenons-nous il n y a pas si longtemps des affres du très proche «Green Washing»…
Bonus
Une précieuse liste d’ouvrages sélectionnés rien que pour vous par Tristan Harris…